4.3.2011 – 181 Avenue Jean-Moulin : Marie-Line Guiot tue son beau-père Alban Berlan après des années d’abus

Elle est accusée de la mort de son beau-père le 4.3.2011

Une triste affaire familiale jugée jeudi devant les assises de Montpellier. (D.R.)

Place du délit : 181, avenue Jean-Moulin – 34500 Béziers.

11.6.2015 – Une femme de 42 ans, agressée sexuellement par le mari de sa mère, est jugée ce jeudi. Le verdict sera rendu lundi.

Une femme de 42 ans est jugée devant la cour d’assises de l’Hérault ce jeudi. Lundi, le verdict sera connu. Elle est suspectée d’avoir tué, le 4 mars 2011, son beau-père d’un coup de couteau dans le ventre. Elle l’accusait de l’avoir agressée sexuellement pendant des années. Le jour des faits, après avoir abordé le sujet avec sa mère, elle s’est saisie d’un petit couteau posé sur la table de la cuisine et est allée dans la chambre de son beau-père, malade et alité. Là, elle l’a gravement blessé. La victime ne décédera que deux semaines plus tard de complications postopératoires.

“C’est un dossier humainement très intéressant à plaider. La vie de cette femme est dramatique, explique Me Katia Fischer qui défend l’accusée. Elle a perdu son père après le divorce de ses parents. Elle a tu, des années, les agressions subies. Tout cela car elle voyait sa mère heureuse avec son bourreau. Elle a fait le choix de tout garder pour elle. Intérieurement, pourtant, elle nourrissait une haine intense contre son beau-père.”

Agressée par ses oncles !

Le jour des faits, l’accusée a appelé la police et les secours. Elle a attendu leur arrivé et a tout expliqué aux policiers. Placée en garde à vue, elle a été mise en examen par la juge d’instruction Anne-Flore Lebondidier, puis placée sous contrôle judiciaire. On apprendra alors, qu’elle avait aussi été victime d’agressions sexuelles à répétitions. Des agressions commises par les propres frères de son père biologique. Ces deux derniers seront entendus, reconnaîtront en partie les faits, mais ne seront jamais inquiétés. Les faits étant prescrits.

“Ma cliente a détruit sa vie en gardant tout pour elle. Elle ne s’est pas mariée, n’a jamais eu d’enfant. Aujourd’hui, elle est suivie psychologiquement ce qui l’aide à extérioriser tous ces drames. Le jour des faits, elle a eu un geste de ras-le-bol. Tout cela lui ressemblait tellement peu que quand elle a dit à sa mère qu’elle avait tué son beau-père, elle n’a pas été crue. En plantant ce couteau, elle voulait se débarrasser de son passé”, ajoute Me Fischer.

Une requalification des faits ?

La victime a été tout de suite prise en charge par l’équipe médicale de l’hôpital de Béziers et l’opération a été un succès. Un jeune homme s’en serait très bien sorti. Le beau-père est décédé d’une infection pulmonaire. “Je veux me battre pour obtenir une requalification des faits. Son geste n’a pas donné la mort. Ma cliente sait qu’elle a commis une lourde faute et n’est absolument pas dans le déni. Elle s’attend à payer et moi je vais devoir mener un combat juridique pour qu’elle ne parte pas en prison.” Le contrôle judiciaire de l’accusée a été levé. Elle peut aujourd’hui voir sa mère sans problème. Ce jeudi, il ne devrait pas y avoir de partie civile face à elle.

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Un crime d’adulte commis par une enfant souillée aux assises de l’Hérault

Le verdict sera connu lundi (Stéphane Barbier)

12.6.2015 – Marie-Line Guiot comparaît devant la cour d’assises de l’Hérault pour le meurtre de son beau-père, perpétré à Béziers, au matin du 4 mars 2011.

“J’ai posé ma main sur le fauteuil, me suis penché vers lui, planté le couteau et l’ai retiré…. Je pense qu’effectivement, je voulais le tuer…”, raconte Marie-Line Guiot. Depuis ce box des assises de l’Hérault devant lesquelles elle comparaît, libre, cette quadragénaire raconte. Comment ce 4 mars 2011, vers 10 h, dans cet appartement situé au 181, avenue Jean-Moulin à Béziers, à la suite d’une énième dispute avec sa mère, elle a soudain basculé dans le crime. S’est saisie d’un petit couteau de cuisine, a foncé dans la chambre où se trouvait son beau-père, aveugle depuis l’adolescence et à l’état de santé très dégradé. Là, sans un mot, elle lui a porté un coup au niveau de l’abdomen. Elle a ensuite posé l’arme, dit à sa mère : “Ça y est, je l’ai fait, je l’ai tué !”, appelé sa sœur puis la police à laquelle elle a déclaré : “Il faut que vous veniez, j’ai tué mon beau-père”.

L’homme n’est pas mort à la suite du coup reçu

Touché au foie, Alban Berlan, 79 ans, devait décéder, treize jours plus tard, sur son lit du service de réanimation du CHRU de Montpellier où il avait été transporté. Un homme qui n’est pas mort à la suite du coup reçu. Celui-ci n’ayant que précipité sa fin de vie “dont l’espérance était limitée”, insiste le médecin-légiste. Et ce, du fait d’un diabète très avancé, d’une insuffisance cardiaque, de problèmes rénaux, d’artères en très mauvais états, de coronaires bouchées… Un sombre tableau clinique. Sinistres aussi sont certains passages de l’enfance de l’accusée. Qui, dès l’âge de huit ans, aurait subi les assauts des frères de son père. Puis, à l’adolescence, ceux de son beau-père, la victime. Une situation connue mais tue ou contenue.

“Ma mère, elle attendait qu’on lui dise : “On peut comprendre (que tu sois resté avec lui, NDLR), tu avais raison””, raconte Marie-Line Guiot. Qui, le jour des faits, dans cette maison où elle était revenue vivre depuis quelques jours à la suite de la perte de son emploi d’infographiste, se dispute une énième fois avec sa mère. À laquelle elle s’était confiée vers l’âge de 24 ou 25 ans. En guise de réponse, celle-ci lui aurait dit : “Tu sais, il a payé pour ces conneries”.

“Mais pour moi ce n’était pas une connerie et cela n’avait rien à voir avec sa maladie”, poursuit Marie-Line Guiot. Laquelle aurait très bien pu basculer dans le crime deux jours auparavant, deux semaines plus tard. Mais ce 4 mars, elle a explosé. “Cinq secondes avant de prendre le couteau, je ne pensais pas faire ça, je ne m’en sentais pas capable”. L’instant suivant lui a donné tort. Cette énième altercation a, cette fois, pris le dessus sur sa psyché. La victime eût été différente est-ce que cela aurait changé ce funeste épilogue ? L’expert psychiatre le pense à propos de celle présentant toutes les caractéristiques des personnes sexuellement abusées. Et le dit : “J’ai le sentiment que si cet homme n’avait pas été non-voyant, elle ne l’aurait pas frappé”.

Les débats reprennent et s’achèvent lundi 15 juin 2015.

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Meurtre au couteau à Béziers : quatre ans ferme

L’affaire était jugée à Montpellier (Richard de Hullessen)

18.6.2015 – Une femme était jugée pour avoir porté un coup de couteau, à Béziers, devenu fatal. La victime, son beau-père, avait abusé d’elle.

De la justice privée au cas d’école d’une affaire criminelle aux assises : c’est tout cela le procès de Marie-Line Guiot. Cette jeune quadragénaire jugée jeudi et mardi par la cour héraultaise pour avoir, le 4 mars 2011 à Béziers, occis Alban Berlan, son beau-père, en lui portant un coup de couteau. Geste devenu mortel pour un homme de 79 ans dont le tableau sanitaire général était, depuis un moment déjà, en jachère. Ce que n’a donc pas arrangé ce coup d’arme blanche. Et qui a, de fait et à la suite de complications post-opératoires, entraîné le décès du septuagénaire, treize jours plus tard.

Des années d’abus sexuels

Soit l’issue, funeste cette fois, d’une énième dispute entre la future accusée et sa mère, pour venger des années d’abus sexuels. D’indélébiles souillures perpétrées par les oncles de Marie-Line Guiot. Puis par la victime ensuite. Tout cela dans le pesant confinement d’un environnement familial à tout le moins taiseux. Pire, complice. “Un drame dû au silence, au secret, à cette chape de plomb”, concède l’avocate générale Brignol. Comme l’avait évoqué, un peu plus tôt dans la journée, avec ses mots à elle, la sœur de Marie-Line Guiot. La première à avoir subi les assauts de leurs oncles. “Cela fait quarante ans qu’on sait qu’on est des salopes, des moins que rien… Que la femme ne vaut rien.. Le geste de ma sœur est condamnable. Mais je la comprends. Et je suis fière d’elle parce qu’elle assume complètement (…) On a pris la décision de ne pas avoir d’enfants. Parce qu’on s’est dit : “Est-ce que l’on ne va pas reproduire ça ? Est-ce que l’on saura les protéger ?”.”Bref, une singulière famille “où on était dans la protection des adultes, pas des enfants”.

Un récit qui laisse interdit

Un récit qui laisse interdit. Mais dans lequel, pourtant, on ne trouve nulle haine, nul désir de vengeance, nul accablement à l’endroit de feu la victime. Il n’empêche… “Les faits sont assumés, pour ne pas dire revendiqués”, estime l’avocate générale. Mettant, dès lors en garde : “Il ne faut pas tomber dans l’écueil d’une trop grande répression ou d’une bienveillance excessive.” Face à une femme ayant “ruminé toute sa douleur pendant des mois, des années”. Une femme devenue, ce jour-là, “une cocotte-minute qui va exploser”. La suite est connue. De fait : “Sur sa culpabilité, il n’y aura aucun doute possible lorsque vous vous retirerez pour délibérer.” Et ce, malgré ce contexte donc, cette famille “dysfonctionnelle”. La magistrate regrettant enfin : “Si quelqu’un avait brisé cette loi du silence, Monsieur Berlan aurait été jugé.” Pour, au final, réclamer une peine comprise entre cinq et sept années de prison.

“Vous devez bien retenir que son geste aurait simplement pu être un délit. Il était tout à fait facile pour elle de viser le cœur. C’est ce que l’on atteint quand on veut tuer”, martèle Me Fischer depuis le banc de la défense. Et de dénoncer ce dossier comme celui “de tous les paradoxes et de toutes les ambiguïtés. Elle devrait être sur le banc des victimes et ses bourreaux, là (en pointant le box, NDLR), au nombre de trois ! N’ajoutez pas à sa culpabilité ce reproche de ne pas avoir porté plainte. N’en rajoutez pas. C’est assez lourd comme cela!”

C’est aussi ce qu’en ont pensé, pour partie, les jurés en condamnant, mardi peu après 20h, Marie-Line Guiot à cinq ans de geôle, dont quatre ferme.

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Source :

https://www.midilibre.fr – Jean-Pierre Amarger 11.6.2015 / Jean François Codomié 12.6.2015 – 18.6.2015